
Nicolas Fouquet, par Edouard Lacretelle
I. La jeunesse et les débuts dans l'administration
Nicolas Fouquet est le second fils de François IV Fouquet, conseiller au parlement de Paris, maître des requêtes de l'Hôtel du Roi avant de devenir conseiller d'Etat. François Fouquet était aussi associé à la Compagnie des îles d'Amérique. La mère de Nicolas Fouquet est Marie de Maupéou, issue d'une importante famille de la noblesse de robe. La famille a fait fortune dans le commerce des draps avant de se reconvertir dans la magistrature. En effet, malgré les velléités des Fouquet à l'époque, ils ne sont absolument pas d'origine noble : le trisaïeul de Nicolas Fouquet, nommé François Foucquet était un marchand et son père l'était également - c'était un marchand de drap d'Angers. Un « foucquet », en gallo, est un écureuil ! Il apparaît d'ailleurs sur le blason de la famille et dans sa devise - « Quo non ascendet ? » (« Jusqu'où ne montera-t-il pas ? »).
François IV Fouquet, lui, a eu la chance de faire fortune en tant qu'armateur et se fait ainsi remarquer par le cardinal de Richelieu, principal ministre de Louis XIII. Le cardinal-ministre va le faire entrer au Conseil de la Marine et du Commerce. Ce n'est que le début de sa carrière, qui va l'amener jusqu'à devenir conseiller d'Etat ordinaire puis maître des requêtes à Paris.
Profondément religieuse, à l'instar de la famille de Maupéou, les Fouquet - « une famille exemplaire de la Contre-Réforme » - verra les six filles de la fratrie devenir religieuses tandis que quatre garçons sont tonsurés. Seuls Nicolas et son frère Gilles restent des laïcs. Deux des quatre garçons qui sont entrés en religion deviendront évêques.
Bien que laïc, Nicolas reçoit une éducation religieuse stricte, au collège de Clermont, tenu par les Jésuites. Tout en étudiant au collège, le jeune Nicolas prête main-forte à sa mère, Marie de Maupéou, qui prépare des médicaments pour les pauvres. Le goût de la chimie et de la pharmacie persistera d'ailleurs bien longtemps chez Nicolas. A ce moment-là, comme Nicolas n'est pas l'aîné, il est destiné à devenir, lui aussi, un ecclésiastique et reçoit même la tonsure en janvier 1635. Il devient ensuite trésorier de l'abbaye Saint-Martin de Tours et reçoit le bénéfice du prieuré de Saint-Julien de Doüy. Malgré cela, sa famille hésite toujours quant à sa carrière : quelle orientation lui donner ? Nicolas doit-il rester en religion ou bien redevenir un laïc ? Finalement, son père choisit de lui faire étudier le droit. Selon le jurisconsulte Christophe Balthazar, c'est le cardinal Richelieu lui-même qui a su convaincre François IV Fouquet de faire de son fils Nicolas un légiste. Il va passer sa Licence de droit à la Faculté de décret de l'Université de Paris avant de se faire inscrire au tableau des avocats.
En 1633, François Fouquet demande pour son fils, toujours par l'entremise de Richelieu, une place de conseiller au Parlement de Paris, mais sa demande est refusée, car son fils aîné, François V Fouquet, possède déjà une charge similaire. Nicolas ne va pas avoir longtemps à patienter pour débuter sa carrière d'homme de loi. Certes, ce n'est pas à Paris, mais il obtient tout de même une charge de conseiller au Parlement de Metz, nouvellement créé par Richelieu. C'est un beau témoignage, de la part du cardinal, de la confiance qu'il a envers le jeune homme et de la faveur dans lequel il tient François, son père. Nicolas obtient même une dispense d'âge pour occuper sa charge sans encombre. Sa mission est la suivante : inventorier les papiers du trésors de la chancellerie de Vic, où sont conservés tous les titres du temporel de l'évêché de Metz mais aussi de l'abbaye de Gorze. Cette mission a un but particulier : vérifier que le duc de Lorraine Charles IV n'empiète pas sur les droits du roi de France, dans sa province lointaine et enclavée dans les territoires du Saint-Empire romain germanique. Nicolas Fouquet réussit sa mission avec brio.
En 1635, le frère aîné de Nicolas, François V, entre dans les ordres. Désormais, c'est sur le jeune homme que repose tous les espoirs d'ascension de la famille. Son père s'empresse de lui acheter une charge de maître des requêtes de l'Hôtel. En 1638, il est détaché de la Cour de Metz pour se rendre à Nancy, où il assiste au consiste souverain, imposé par la France. Là, il mène grand train : on le voit à la comédie, mais aussi dans des bals et des festins. La même année, son père choisit de commencer à l'initier aux affaires et lui cède pour cela une part dans la Compagnie des îles d'Amérique.
Lorsque le père de famille se sent proche de sa fin, il n'a de cesse d'inciter son fils à se marier. Le jeune homme, héritier de la fortune de la famille Fouquet va se marier avec Louise Fourché dame de Quéhillac. C'est une petite-fille d'un maire de Nantes, Jean Fourché, en 1597 et 1598. le contrat de mariage est signé par les parents le 10 janvier 1640 et la cérémonie nuptiale a lieu le 24 janvier suivant à la cathédrale Notre-Dame de Nantes. C'est un riche mariage qui se noue là : Louise apporte en effet 160 000 livres en dot, ce qui est une somme tout de même extraordinaire. Nicolas, lui, reçoit de ses parents la propriété de sa charge de maître des requêtes, estimée à 150 000 livres, plus une rente de 4000 livres au denier 18, ce qui représente un capital d'environ 20 000 livres. On a une preuve ici, de l'opulence de cette famille de la noblesse de robe !
Autre point commun entre les deux mariés : ils sont fortement liés, par leur parenté respective, à la Bretagne. Louise par ses parents -son père est même conseiller au Parlement de Bretagne- et Nicolas par ses cousins, les Chalain, et par son père, également, qui a des liens plutôt importants avec les compagnies de commerce de l'Atlantique. Peu de temps après ses noces, Nicolas va perdre son père, François Fouquet, qui meurt au début de l'année 1641, puis c'est au tour de son grand-père maternel, Gilles de Maupéou, de disparaître. Cette même année, la jeune épouse de Nicolas, Louise, meurt à la suite de son accouchement (elle accouche d'une fille prénommée Marie). Nicolas Fouquet se retrouve donc veuf.
Il n'en reste pas moins inactif et va reprendre les affaires...il reprend notamment le flambeau de son père au sein des différentes compagnies maritimes dans lesquelles la famille Fouquet possède des parts : on peut citer par exemple la Compagne des Îles d'Amérique ou encore, la Compagnie du Sénégal, entre autres...En 1640, Nicolas fait partie des premiers actionnaires de la Société du Cap-Nord puis il investit dans celle des Indes orientales.
Grâce à la dot de son épouse défunte, qui était plutôt imposante, Nicolas Fouquet va pouvoir acheter la terre de Vaux, dans le baillage de Melun, en région parisienne. Il se fait désormais appeler vicomte de Vaux. En 1642, le cardinal de Richelieu, qui était de longue date protecteur de la famille Fouquet meurt. Cette mort du cardinal-ministre vient mettre fin à tous les rêves coloniaux et maritimes que Nicolas aurait pu nourrir. Il choisit alors de se consacrer exclusivement au service de l'Etat. Heureusement pour lui, l'équipe ministérielle est maintenue en l'état par le roi Louis XIII, puis, à la mort de celui-ci en 1643, par son épouse Anne d'Autriche, devenue régente et le cardinal Mazarin, qui devient ainsi le nouveau supérieur de Nicolas Fouquet.
En 1644, le jeune homme est nommé intendant de justice, police et finances, à Grenoble, dans l'ancienne province du Dauphiné. C'est un poste plutôt difficile pour un jeune homme peu expérimenté comme Nicolas, propulsé ainsi dans une province qu'il ne connaît pas. Au cours de l'été, alors qu'il a quitté sa circonscription pour assister à l'intronisation de son frère François, nommé évêque d'Agde, une émeute de paysan éclate en Dauphiné, contre la levée d'impôts. Considéré comme responsable, Nicolas est révoqué par Mazarin.
Curieusement, ce sont de nouvelles émeutes paysannes qui vont lui permettre d'atténuer un peu la disgrâce dans laquelle il est tombé aux yeux de l'Etat : sur le chemin du retour, qui le ramène vers Paris, il est témoin de nouvelles émeutes, qui ont éclaté à Valence. Grâce à son sang-froid et ses talents d'orateur, mais aussi, il faut bien le dire, grâce à son courage, il va parvenir à calmer les paysans révoltés. Pour récompense, il réintègre, dès 1646, le corps des maîtres des requêtes. Il va ensuite se voir confier une mission d'observation par Mazarin lui-même, en Espagne, lors du siège de Lérida.
Lors de la Fronde, il n'hésite pas et se range aussitôt du côté d'Anne d'Autriche et Mazarin, ignorant les Frondeurs. Il va continuer son ascension durant cette période et accéder, en 1650, à l'élite de la noblesse de robe. En 1651, il conclut un second mariage : sa seconde épouse se nomme Marie-Madeleine de Castille-Villemereuil, souvent connue sous le seul nom de Marie-Madeleine de Castille. Elle appartient elle aussi à une famille de marchands anoblis. Elle a quinze ans, Nicolas Fouquet, près de trente-six. Sa dot est inférieure à celle de Louise Fourché, la première épouse, mais elle apporte tout de même, en compensation, le vaste cercle de relations qu'a réussi à se tisser la famille de sa mère, éminente famille de robe parisienne.
Au même moment, le Parlement vote l'expulsion de Mazarin. Mais ce dernier a jugé plus prudent de partir de lui-même et s'est retiré en Allemagne. Officiellement, Nicolas Fouquet, qui est procureur général, instruit contre son ancien patron. Mais, en sous-main, il le tient en fait informé jusqu'à son retour en grâce, grâce notamment à son frère Basile, « l'abbé Fouquet », qui était le chef de la police secrète de Mazarin. Après la Fronde, il fustigera ses collègues parlementaires et frondeurs et se montrera impitoyable envers les partisans du prince de Condé, chef de file de la Fronde des Princes.
François IV Fouquet, lui, a eu la chance de faire fortune en tant qu'armateur et se fait ainsi remarquer par le cardinal de Richelieu, principal ministre de Louis XIII. Le cardinal-ministre va le faire entrer au Conseil de la Marine et du Commerce. Ce n'est que le début de sa carrière, qui va l'amener jusqu'à devenir conseiller d'Etat ordinaire puis maître des requêtes à Paris.
Profondément religieuse, à l'instar de la famille de Maupéou, les Fouquet - « une famille exemplaire de la Contre-Réforme » - verra les six filles de la fratrie devenir religieuses tandis que quatre garçons sont tonsurés. Seuls Nicolas et son frère Gilles restent des laïcs. Deux des quatre garçons qui sont entrés en religion deviendront évêques.
Bien que laïc, Nicolas reçoit une éducation religieuse stricte, au collège de Clermont, tenu par les Jésuites. Tout en étudiant au collège, le jeune Nicolas prête main-forte à sa mère, Marie de Maupéou, qui prépare des médicaments pour les pauvres. Le goût de la chimie et de la pharmacie persistera d'ailleurs bien longtemps chez Nicolas. A ce moment-là, comme Nicolas n'est pas l'aîné, il est destiné à devenir, lui aussi, un ecclésiastique et reçoit même la tonsure en janvier 1635. Il devient ensuite trésorier de l'abbaye Saint-Martin de Tours et reçoit le bénéfice du prieuré de Saint-Julien de Doüy. Malgré cela, sa famille hésite toujours quant à sa carrière : quelle orientation lui donner ? Nicolas doit-il rester en religion ou bien redevenir un laïc ? Finalement, son père choisit de lui faire étudier le droit. Selon le jurisconsulte Christophe Balthazar, c'est le cardinal Richelieu lui-même qui a su convaincre François IV Fouquet de faire de son fils Nicolas un légiste. Il va passer sa Licence de droit à la Faculté de décret de l'Université de Paris avant de se faire inscrire au tableau des avocats.
En 1633, François Fouquet demande pour son fils, toujours par l'entremise de Richelieu, une place de conseiller au Parlement de Paris, mais sa demande est refusée, car son fils aîné, François V Fouquet, possède déjà une charge similaire. Nicolas ne va pas avoir longtemps à patienter pour débuter sa carrière d'homme de loi. Certes, ce n'est pas à Paris, mais il obtient tout de même une charge de conseiller au Parlement de Metz, nouvellement créé par Richelieu. C'est un beau témoignage, de la part du cardinal, de la confiance qu'il a envers le jeune homme et de la faveur dans lequel il tient François, son père. Nicolas obtient même une dispense d'âge pour occuper sa charge sans encombre. Sa mission est la suivante : inventorier les papiers du trésors de la chancellerie de Vic, où sont conservés tous les titres du temporel de l'évêché de Metz mais aussi de l'abbaye de Gorze. Cette mission a un but particulier : vérifier que le duc de Lorraine Charles IV n'empiète pas sur les droits du roi de France, dans sa province lointaine et enclavée dans les territoires du Saint-Empire romain germanique. Nicolas Fouquet réussit sa mission avec brio.
En 1635, le frère aîné de Nicolas, François V, entre dans les ordres. Désormais, c'est sur le jeune homme que repose tous les espoirs d'ascension de la famille. Son père s'empresse de lui acheter une charge de maître des requêtes de l'Hôtel. En 1638, il est détaché de la Cour de Metz pour se rendre à Nancy, où il assiste au consiste souverain, imposé par la France. Là, il mène grand train : on le voit à la comédie, mais aussi dans des bals et des festins. La même année, son père choisit de commencer à l'initier aux affaires et lui cède pour cela une part dans la Compagnie des îles d'Amérique.
Lorsque le père de famille se sent proche de sa fin, il n'a de cesse d'inciter son fils à se marier. Le jeune homme, héritier de la fortune de la famille Fouquet va se marier avec Louise Fourché dame de Quéhillac. C'est une petite-fille d'un maire de Nantes, Jean Fourché, en 1597 et 1598. le contrat de mariage est signé par les parents le 10 janvier 1640 et la cérémonie nuptiale a lieu le 24 janvier suivant à la cathédrale Notre-Dame de Nantes. C'est un riche mariage qui se noue là : Louise apporte en effet 160 000 livres en dot, ce qui est une somme tout de même extraordinaire. Nicolas, lui, reçoit de ses parents la propriété de sa charge de maître des requêtes, estimée à 150 000 livres, plus une rente de 4000 livres au denier 18, ce qui représente un capital d'environ 20 000 livres. On a une preuve ici, de l'opulence de cette famille de la noblesse de robe !
Autre point commun entre les deux mariés : ils sont fortement liés, par leur parenté respective, à la Bretagne. Louise par ses parents -son père est même conseiller au Parlement de Bretagne- et Nicolas par ses cousins, les Chalain, et par son père, également, qui a des liens plutôt importants avec les compagnies de commerce de l'Atlantique. Peu de temps après ses noces, Nicolas va perdre son père, François Fouquet, qui meurt au début de l'année 1641, puis c'est au tour de son grand-père maternel, Gilles de Maupéou, de disparaître. Cette même année, la jeune épouse de Nicolas, Louise, meurt à la suite de son accouchement (elle accouche d'une fille prénommée Marie). Nicolas Fouquet se retrouve donc veuf.
Il n'en reste pas moins inactif et va reprendre les affaires...il reprend notamment le flambeau de son père au sein des différentes compagnies maritimes dans lesquelles la famille Fouquet possède des parts : on peut citer par exemple la Compagne des Îles d'Amérique ou encore, la Compagnie du Sénégal, entre autres...En 1640, Nicolas fait partie des premiers actionnaires de la Société du Cap-Nord puis il investit dans celle des Indes orientales.
Grâce à la dot de son épouse défunte, qui était plutôt imposante, Nicolas Fouquet va pouvoir acheter la terre de Vaux, dans le baillage de Melun, en région parisienne. Il se fait désormais appeler vicomte de Vaux. En 1642, le cardinal de Richelieu, qui était de longue date protecteur de la famille Fouquet meurt. Cette mort du cardinal-ministre vient mettre fin à tous les rêves coloniaux et maritimes que Nicolas aurait pu nourrir. Il choisit alors de se consacrer exclusivement au service de l'Etat. Heureusement pour lui, l'équipe ministérielle est maintenue en l'état par le roi Louis XIII, puis, à la mort de celui-ci en 1643, par son épouse Anne d'Autriche, devenue régente et le cardinal Mazarin, qui devient ainsi le nouveau supérieur de Nicolas Fouquet.
En 1644, le jeune homme est nommé intendant de justice, police et finances, à Grenoble, dans l'ancienne province du Dauphiné. C'est un poste plutôt difficile pour un jeune homme peu expérimenté comme Nicolas, propulsé ainsi dans une province qu'il ne connaît pas. Au cours de l'été, alors qu'il a quitté sa circonscription pour assister à l'intronisation de son frère François, nommé évêque d'Agde, une émeute de paysan éclate en Dauphiné, contre la levée d'impôts. Considéré comme responsable, Nicolas est révoqué par Mazarin.
Curieusement, ce sont de nouvelles émeutes paysannes qui vont lui permettre d'atténuer un peu la disgrâce dans laquelle il est tombé aux yeux de l'Etat : sur le chemin du retour, qui le ramène vers Paris, il est témoin de nouvelles émeutes, qui ont éclaté à Valence. Grâce à son sang-froid et ses talents d'orateur, mais aussi, il faut bien le dire, grâce à son courage, il va parvenir à calmer les paysans révoltés. Pour récompense, il réintègre, dès 1646, le corps des maîtres des requêtes. Il va ensuite se voir confier une mission d'observation par Mazarin lui-même, en Espagne, lors du siège de Lérida.
Lors de la Fronde, il n'hésite pas et se range aussitôt du côté d'Anne d'Autriche et Mazarin, ignorant les Frondeurs. Il va continuer son ascension durant cette période et accéder, en 1650, à l'élite de la noblesse de robe. En 1651, il conclut un second mariage : sa seconde épouse se nomme Marie-Madeleine de Castille-Villemereuil, souvent connue sous le seul nom de Marie-Madeleine de Castille. Elle appartient elle aussi à une famille de marchands anoblis. Elle a quinze ans, Nicolas Fouquet, près de trente-six. Sa dot est inférieure à celle de Louise Fourché, la première épouse, mais elle apporte tout de même, en compensation, le vaste cercle de relations qu'a réussi à se tisser la famille de sa mère, éminente famille de robe parisienne.
Au même moment, le Parlement vote l'expulsion de Mazarin. Mais ce dernier a jugé plus prudent de partir de lui-même et s'est retiré en Allemagne. Officiellement, Nicolas Fouquet, qui est procureur général, instruit contre son ancien patron. Mais, en sous-main, il le tient en fait informé jusqu'à son retour en grâce, grâce notamment à son frère Basile, « l'abbé Fouquet », qui était le chef de la police secrète de Mazarin. Après la Fronde, il fustigera ses collègues parlementaires et frondeurs et se montrera impitoyable envers les partisans du prince de Condé, chef de file de la Fronde des Princes.
II. Surintendant des Finances royales
La place de Fouquet au sein de l'administration royale est stable désormais et il avance doucement vers le poste suprême : Surintendant des Finances. En 1653, le surintentant des Finances meurt subitement et Nicolas Fouquet n'hésite pas une seconde à se porter candidat à sa succession. Mais Mazarin, qui applique à la lettre l'adage « diviser pour mieux régner » crée un second poste de Surintendant des Finances et oublie royalement Fouquet, qui lui a pourtant rendu de grands services lors de son exil allemand. En effet, à ce poste nouvellement créé, il nomme le diplomate Abel Servien. Néanmoins, l'autre poste de Surintendant est tout de même remporté par Fouquet, le 7 février, sur tous les autres candidats (on peut citer, entre autres, Le Tellier ou encore, Mathieu Molé, l'ancien surintendant de Maison...). Il doit sa nomination à sa bonne et loyale conduite durant la Fronde, mais aussi à l'influence de son frère Basile. A la place de Surintendant est assorti un brevet de ministre, qui va permettre à Fouquet de siéger au Conseil d'En-Haut, la plus haute et la plus puissante des instances royales. Il devient aussi le plus jeune Surintendant des Finances jamais élu !
En ce qui concerne sa compétence, les avis divergent chez les historiens...Par exemple, Jean-Christian Petitfils, son biographe, estime qu'« il connaissait mal les arcanes de la finance » et qu'il était « étranger au milieu des publicains », tandis que Daniel Dessert, lui, explique que Fouquet avait des compétences financières et commerciales certaines.
En tous cas, lorsque Fouquet accède au poste tant convoité, les finances royales sont dans un état particulièrement pitoyable. Les besoins sont particulièrement importants, pour financer à la fois l'effort de guerre et les dépenses personnelles du jeune roi Louis XIV, mais le Trésor est en véritable banqueroute et la conjucture fiscale est catastrophique (les tailles ne rentrent plus et le stock de métaux précieux disponible est insuffisant). Pour faire face à la situation et essayer de la contrer, Fouquet n'a pas de technique particulière, mais pourtant, il va parvenir à améliorer un peu la situation. Seulement, cette amélioration n'apporte que des nouvelles dépenses, totalement inconsidérées et, dès 1654, la crise revient. Le Surintendant se voit alors dans l'oblugation de s'engager sur sa fortune personnelle et celle, aussi, de ses proches. Parallèlement à ces difficultés qu'il rencontre dans l'exercice de sa charge, il doit aussi faire face aux faveurs changeantes du cardinal Mazarin et les critiques de Colbert, qui commence son ascension, dans l'ombre du cardinal-ministre (c'est son intendant). Exaspéré, Fouquet va même jusqu'à présenter sa démission, mais celle-ci est refusée. Pour couronner le tout, il ne s'entend pas vraiment bien avec son collègue surintendant, Servien.
En ce qui concerne sa compétence, les avis divergent chez les historiens...Par exemple, Jean-Christian Petitfils, son biographe, estime qu'« il connaissait mal les arcanes de la finance » et qu'il était « étranger au milieu des publicains », tandis que Daniel Dessert, lui, explique que Fouquet avait des compétences financières et commerciales certaines.
En tous cas, lorsque Fouquet accède au poste tant convoité, les finances royales sont dans un état particulièrement pitoyable. Les besoins sont particulièrement importants, pour financer à la fois l'effort de guerre et les dépenses personnelles du jeune roi Louis XIV, mais le Trésor est en véritable banqueroute et la conjucture fiscale est catastrophique (les tailles ne rentrent plus et le stock de métaux précieux disponible est insuffisant). Pour faire face à la situation et essayer de la contrer, Fouquet n'a pas de technique particulière, mais pourtant, il va parvenir à améliorer un peu la situation. Seulement, cette amélioration n'apporte que des nouvelles dépenses, totalement inconsidérées et, dès 1654, la crise revient. Le Surintendant se voit alors dans l'oblugation de s'engager sur sa fortune personnelle et celle, aussi, de ses proches. Parallèlement à ces difficultés qu'il rencontre dans l'exercice de sa charge, il doit aussi faire face aux faveurs changeantes du cardinal Mazarin et les critiques de Colbert, qui commence son ascension, dans l'ombre du cardinal-ministre (c'est son intendant). Exaspéré, Fouquet va même jusqu'à présenter sa démission, mais celle-ci est refusée. Pour couronner le tout, il ne s'entend pas vraiment bien avec son collègue surintendant, Servien.
III. Les demeures de Fouquet
Le château de Vaux-le-Vicomte, chef-d'oeuvre du classicisme est sans nul doute la demeure de Fouquet la plus connue
On l'a vu, grâce à la dote importante de sa première épouse, Louise, Nicolas Fouquet a pu s'acheter la terre de Vaux, en région parisienne, dont il va faire un chef-d'oeuvre. Mais il possède plusieurs autres demeure. Jeune, il demeure à Paris, dans la maison familiale située rue de Jouy. Il va ensuite acquérir une maison rue de Matignon avant de déménagé à l'hôtel de Castille, apporté en dot par Marie-Madeleine, sa seconde épouse. Il possède aussi deux autres hôtels, celui de Narbonne et celui d'Emery, qui jouxte l'hôtel de Mazarin. Il va également devenir propriétaire d'une terre à Saint-Mandé. Il va faire rebâtir et embellir la maison qui s'y trouve. En parallèle, il se constitue une formidable collection de livres (environ 27 000 ouvrages). Dans ses innombrables demeures, il laisse aussi libre court à sa passion pour les jardins, qu'il aime aménager et décorer, avec des serres et des orangeries. Nicolas Fouquet a, on peut le dire, un goût très sûr.
Mais on ne peut pas parler des demeures de Fouquet sans évoquer Vaux, qui fut sûrement sa plus belle réalisation mais aussi, l'outil, le prétexte à sa chute...Aujourd'hui, le château de Vaux-le-Vicomte se situe en Seine-et-Marne et est ouvert à la visite. C'est à partir de 1653 que le Surintendant entreprend la construction de ce château. Le terrain, avant d'être racheté, n'était qu'une friche, au milieu de laquelle se trouvait un vieux château. Fouquet va commencer par racheter les terres alentours puis il fait raser le village de Veaux et quelques hameaux, fait disparaître des bois, détourne une rivière et fait arracher des vignes. Le Vau, Le Brun, Le Nôtre, que l'on retrouvera ensuite sur le chantier de Versailles et Villedo, travaillent sur le chantier. Au même moment, Fouquet s'entoure d'une petite cour d'écrivains qui feront ensuite le bonheur de la Cour : on peut penser à Molière, par exemple. Mais Fouquet se fait aussi protecteur de La Fontaine, peu en cours auprès du pouvoir royal et il fréquente des Précieuses, comme Madame de Sévigné ou encore Mademoiselle de Scudéry. Le roi vient à Vaux pour la première fois en 1659, deux ans avant la fête fatale. En 1660, le 17 juillet exactement, Fouquet reçoit de nouveau son souverain accompagné de sa toute jeune épouse, l'infante d'Espagne Marie-Thérèse qu'il a épousée quelques temps plus tôt à Saint-Jean-de-Luz. Un an plus tard, le Surintendant donne une nouvelle fête en l'honneur de la Cour dans sa propriété de Vaux, mais le roi ne peut y assister. Une nouvelle réception est donc prévue pour le 17 août de cette même année, où le monarque est attendu ainsi que 600 courtisans. La fête est somptueuse, dispendieuse...on peut y admirer des jets d'eaux dans les jardins, des feux d'artifice, des buffets, prévoyant mille couverts et supervisés par François Vattel lui-même. Enfin, la pièce de Molière, Les Fâcheux, est présentée aux invités.
Le jeune roi Louis XIV, dont les finances ne sont pas au beau fixe, est furieux du faste étalé avec autant d'ostentation par son ministre et son surintendant. Bien évidemment, la disgrâce de Fouquet et sa sévère punition ne viennent pas que de cette fête-là et on peut penser que le roi envisageait depuis quelques temps de révoquer Fouquet...Mais la fête de Vaux va certainement être le déclic qui va faire pencher le souverain vers l'arrestation et la disgrâce. De plus, l'origine de l'argent (parce qu'il faut assurément de l'argent pour organiser une telle fête) lui paraît suspecte et il se met donc à soupconner son Surintendant. Et, lorsque Fouquet commet la maladresse de lui proposer de lui offrir Vaux, la fureur royale est à son comble ! Selon l'abbé de Choisy, le jeune roi, en colère, aurait lancé à sa mère Anne d'Autriche, dans le carrosse qui le ramène vers Paris : « Ah, madame, est-ce que nous ne ferons pas rendre gorge à tous ces gens-là ? ».
Mais on ne peut pas parler des demeures de Fouquet sans évoquer Vaux, qui fut sûrement sa plus belle réalisation mais aussi, l'outil, le prétexte à sa chute...Aujourd'hui, le château de Vaux-le-Vicomte se situe en Seine-et-Marne et est ouvert à la visite. C'est à partir de 1653 que le Surintendant entreprend la construction de ce château. Le terrain, avant d'être racheté, n'était qu'une friche, au milieu de laquelle se trouvait un vieux château. Fouquet va commencer par racheter les terres alentours puis il fait raser le village de Veaux et quelques hameaux, fait disparaître des bois, détourne une rivière et fait arracher des vignes. Le Vau, Le Brun, Le Nôtre, que l'on retrouvera ensuite sur le chantier de Versailles et Villedo, travaillent sur le chantier. Au même moment, Fouquet s'entoure d'une petite cour d'écrivains qui feront ensuite le bonheur de la Cour : on peut penser à Molière, par exemple. Mais Fouquet se fait aussi protecteur de La Fontaine, peu en cours auprès du pouvoir royal et il fréquente des Précieuses, comme Madame de Sévigné ou encore Mademoiselle de Scudéry. Le roi vient à Vaux pour la première fois en 1659, deux ans avant la fête fatale. En 1660, le 17 juillet exactement, Fouquet reçoit de nouveau son souverain accompagné de sa toute jeune épouse, l'infante d'Espagne Marie-Thérèse qu'il a épousée quelques temps plus tôt à Saint-Jean-de-Luz. Un an plus tard, le Surintendant donne une nouvelle fête en l'honneur de la Cour dans sa propriété de Vaux, mais le roi ne peut y assister. Une nouvelle réception est donc prévue pour le 17 août de cette même année, où le monarque est attendu ainsi que 600 courtisans. La fête est somptueuse, dispendieuse...on peut y admirer des jets d'eaux dans les jardins, des feux d'artifice, des buffets, prévoyant mille couverts et supervisés par François Vattel lui-même. Enfin, la pièce de Molière, Les Fâcheux, est présentée aux invités.
Le jeune roi Louis XIV, dont les finances ne sont pas au beau fixe, est furieux du faste étalé avec autant d'ostentation par son ministre et son surintendant. Bien évidemment, la disgrâce de Fouquet et sa sévère punition ne viennent pas que de cette fête-là et on peut penser que le roi envisageait depuis quelques temps de révoquer Fouquet...Mais la fête de Vaux va certainement être le déclic qui va faire pencher le souverain vers l'arrestation et la disgrâce. De plus, l'origine de l'argent (parce qu'il faut assurément de l'argent pour organiser une telle fête) lui paraît suspecte et il se met donc à soupconner son Surintendant. Et, lorsque Fouquet commet la maladresse de lui proposer de lui offrir Vaux, la fureur royale est à son comble ! Selon l'abbé de Choisy, le jeune roi, en colère, aurait lancé à sa mère Anne d'Autriche, dans le carrosse qui le ramène vers Paris : « Ah, madame, est-ce que nous ne ferons pas rendre gorge à tous ces gens-là ? ».
IV. La chute

Buste de Colbert par Coysevox : le ministre était un rival affiché de Fouquet
On peut se demander pourquoi la chute et la disgrâce de Fouquet furent si soudaine alors qu'en mars 1661, lorsque Mazarin meurt, sa faveur est à son comble. Il contrôle en effet le Conseil privé du roi et il a l'oreille de ce dernier, qui lui confie plusieurs missions secrètes. Cependant, Louis XIV commence à se méfier...les critiques incessantes de Colbert, la créature du cardinal, commencent à trouver grâce auprès du roi et l'avertissement de Mazarin, sur son lit de mort, concernant Fouquet, intrigue Louis XIV. Tout ceci joue à la défaveur du Surintendant. Et puis, il est ambitieux...et Louis XIV se méfie des ambitieux. La décision du renvoi de Fouquet remonterait donc au mois de mai de l'année 1661 et non pas à la fête du 17 août, qui ne fut, peut-être, que la goutte d'eau qui fit déborder le vase, finalement. La décision du roi daterait même du 4 mai, précisément.
Seulement, plusieurs choses font obstacle à la chute de Fouquet : sa charge de procureur général, d'une part, qui fait que le Surintendant n'est justiciable que devant le Parlement, qu'il contrôle. D'autre part, il jouit de la faveur de la reine-mère Anne d'Autriche. Mais, dans l'ombre, Colbert oeuvre pour faire tomber son ennemi et celui qui lui barre encore la route du pouvoir suprême...Tout d'abord, il s'arrange pour que Fouquet propose au roi de vendre sa charge pour lui en remettre le produit. Et, dans un second temps, il parvient à gagner la duchesse de Chevreuse, vieille amie de la reine-mère, au parti anti-Fouquet.
Alors que la Cour s'est transportée à Nantes, au mois de septembre 1661, pour assister aux Etats de Bretagne, Fouquet, qui fait partie du voyage est arrêté par d'Artagnan, pour malversations. Surpris par cette arrestation qu'il n'attendait visiblement pas, le Surintendant propose alors au roi de lui remettre Belle-Île, dont il est le gouverneur et parvient aussi à faire prévenir ses proches de son arrestation. Pourtant, ceux-ci ne vont pas en profiter pour faire disparaître les documents qui pourraient se montrer compromettants. Hugues de Lionne, ami de Fouquet, va demander au roi de partager sa disgrâce, mais Louis XIV refuse. Par la suite, Belle-Île se rend sans aucune résistance aux troupes royales.
Dans toutes les demeures de Fouquet, les scellés sont posés et l'instruction commence. Les scellés sont aussi apposés chez les différents clients de Fouquet. Son épouse, Marie-Madeleine, est exilée à Limoges et ses frères Louis et François, hommes d'Eglise, confinés dans leurs diocèes. Gilles, lui, est déchu de sa charge de premier écuyer tandis que Basile, ancien protégé de Mazarin, doit aller s'exiler en Guyenne.
Le 7 septembre, Fouquet est transféré de Nantes au château d'Angers et les perquisitions vont commencer, souvent avec la présence de Colbert, qui n'est pourtant que simple particulier, sans aucun rôle dans l'instruction. Tout au long de l'enquête, il fait amener au roi, en toute irrégularité, des pièces inventoriées, dont certaines sont conservées et d'autres, rendues après quelques jours. Colbert s'emploie aussi à faire analyser tous les comptes et tous les registres saisis chez Fouquet afin d'y trouver une preuve accablante. A Saint-Mandé, derrière un miroir, on retrouve une liste d'instructions, rédigées par Fouquet lui-même en 1657, censées régler une situation de crise. A cette époque, le Surintendant est persuadé que Mazarin a juré sa perte. Le compromettant document prévoit que, en cas d'arrestation puis d'emprisonnement de Fouquet, les gouverneurs comptant parmi ses amis, s'enferment dans leurs citadelles et menacent d'entrer en dissidence s'il n'est pas libéré. Ce plan de défense est inachevé, lacunaire et irréaliste ! On retrouve aussi un engagement pris par les adjudicataires des gabelles de verser une pension annuelle de 120 000 livres à un bénéficiaire anonyme : son nom est laissé en blanc. Néanmoins, pas de doute pour les enquêteurs : il s'agit là d'un pot-de-vin et ce document en est la preuve flagrante.
Nicolas Fouquet accusera Colbert d'avoir fait placer chez lui, à son insu, ce document, issu des papiers personnels de Mazarin et particulièrement compromettant. En effet, le papier n'est pas mentionné dans un premier procès-verbal et il n'est trouvé, étrangemment, qu'après la venue de Colbert chez Fouquet, une visite qui s'avèrera particulièrement minutieuse et fructueuse puisque le document est découvert à ce moment-là.
Pendant ce temps, Louis XIV décide de supprimer la surintendance et la remplace par un véritable le conseil, qui a pour nom le Conseil royal des Finances. Nous sommes le 12 septembre, Fouquet n'est arrêté que de fraîche date. Colbert, son ennemi de toujours, va ensuite prendre sa place au Conseil d'En Haut, qui, on peut s'en douter, lui a été supprimée en même temps que tombait sa disgrâce.
Le 1er décembre 1661, tandis qu'à Paris Colbert et les magistrats de la Cour des aides et de la Chambre des Comptes examinent les comptes de la royauté depuis 1635 pour y chercher la trace d'éventuelles fraudes et malversations, Fouquet est transféré au château d'Amboise, devenu prison d'Etat. La foule, massée le long de la route qu'il emprunte, l'injurie.
Seulement, plusieurs choses font obstacle à la chute de Fouquet : sa charge de procureur général, d'une part, qui fait que le Surintendant n'est justiciable que devant le Parlement, qu'il contrôle. D'autre part, il jouit de la faveur de la reine-mère Anne d'Autriche. Mais, dans l'ombre, Colbert oeuvre pour faire tomber son ennemi et celui qui lui barre encore la route du pouvoir suprême...Tout d'abord, il s'arrange pour que Fouquet propose au roi de vendre sa charge pour lui en remettre le produit. Et, dans un second temps, il parvient à gagner la duchesse de Chevreuse, vieille amie de la reine-mère, au parti anti-Fouquet.
Alors que la Cour s'est transportée à Nantes, au mois de septembre 1661, pour assister aux Etats de Bretagne, Fouquet, qui fait partie du voyage est arrêté par d'Artagnan, pour malversations. Surpris par cette arrestation qu'il n'attendait visiblement pas, le Surintendant propose alors au roi de lui remettre Belle-Île, dont il est le gouverneur et parvient aussi à faire prévenir ses proches de son arrestation. Pourtant, ceux-ci ne vont pas en profiter pour faire disparaître les documents qui pourraient se montrer compromettants. Hugues de Lionne, ami de Fouquet, va demander au roi de partager sa disgrâce, mais Louis XIV refuse. Par la suite, Belle-Île se rend sans aucune résistance aux troupes royales.
Dans toutes les demeures de Fouquet, les scellés sont posés et l'instruction commence. Les scellés sont aussi apposés chez les différents clients de Fouquet. Son épouse, Marie-Madeleine, est exilée à Limoges et ses frères Louis et François, hommes d'Eglise, confinés dans leurs diocèes. Gilles, lui, est déchu de sa charge de premier écuyer tandis que Basile, ancien protégé de Mazarin, doit aller s'exiler en Guyenne.
Le 7 septembre, Fouquet est transféré de Nantes au château d'Angers et les perquisitions vont commencer, souvent avec la présence de Colbert, qui n'est pourtant que simple particulier, sans aucun rôle dans l'instruction. Tout au long de l'enquête, il fait amener au roi, en toute irrégularité, des pièces inventoriées, dont certaines sont conservées et d'autres, rendues après quelques jours. Colbert s'emploie aussi à faire analyser tous les comptes et tous les registres saisis chez Fouquet afin d'y trouver une preuve accablante. A Saint-Mandé, derrière un miroir, on retrouve une liste d'instructions, rédigées par Fouquet lui-même en 1657, censées régler une situation de crise. A cette époque, le Surintendant est persuadé que Mazarin a juré sa perte. Le compromettant document prévoit que, en cas d'arrestation puis d'emprisonnement de Fouquet, les gouverneurs comptant parmi ses amis, s'enferment dans leurs citadelles et menacent d'entrer en dissidence s'il n'est pas libéré. Ce plan de défense est inachevé, lacunaire et irréaliste ! On retrouve aussi un engagement pris par les adjudicataires des gabelles de verser une pension annuelle de 120 000 livres à un bénéficiaire anonyme : son nom est laissé en blanc. Néanmoins, pas de doute pour les enquêteurs : il s'agit là d'un pot-de-vin et ce document en est la preuve flagrante.
Nicolas Fouquet accusera Colbert d'avoir fait placer chez lui, à son insu, ce document, issu des papiers personnels de Mazarin et particulièrement compromettant. En effet, le papier n'est pas mentionné dans un premier procès-verbal et il n'est trouvé, étrangemment, qu'après la venue de Colbert chez Fouquet, une visite qui s'avèrera particulièrement minutieuse et fructueuse puisque le document est découvert à ce moment-là.
Pendant ce temps, Louis XIV décide de supprimer la surintendance et la remplace par un véritable le conseil, qui a pour nom le Conseil royal des Finances. Nous sommes le 12 septembre, Fouquet n'est arrêté que de fraîche date. Colbert, son ennemi de toujours, va ensuite prendre sa place au Conseil d'En Haut, qui, on peut s'en douter, lui a été supprimée en même temps que tombait sa disgrâce.
Le 1er décembre 1661, tandis qu'à Paris Colbert et les magistrats de la Cour des aides et de la Chambre des Comptes examinent les comptes de la royauté depuis 1635 pour y chercher la trace d'éventuelles fraudes et malversations, Fouquet est transféré au château d'Amboise, devenu prison d'Etat. La foule, massée le long de la route qu'il emprunte, l'injurie.
V. Le procès

Le chancelier Séguier, principal accusateur de Fouquet durant son procès
Le procès s'ouvre trois mois plus tard, le 3 mars 1662 précisément et les interrogatoires commencent dès le lendemain, 4 mai. Fouquet n'a alors même pas connaissance des pièces saisies et aucun acte de procédure ne lui a été notifié. La procédure s'embourbe complètement mais le roi a juré sa perte et les juges vont s'employer à le faire tomber : pas question d'un acquittement, même si Fouquet se défend bien, opposant à ses accusateurs des arguments qui ne peuvent souffrir de contradictions. Finalement, au mois de mai, deux mois après le début du procès, l'ancien Surintendant est inculpé. Le 6 juillet, un arrêt du Conseil d'En Haut lui interdit de se pourvoir devant le Parlement, même sa qualité d'ancien procureur général lui en donne le droit. L'accusé n'est pas confronté aux témoins avant le 18 juillet et ce n'est que le sept septembre, six mois après le début de son procès, qu'on lui accorde enfin un conseil. Le 18 octobre, la cour annonce que, désormais, la procédure va se dérouler uniquement par écrit. En sous-main, Colbert oeuvre pour faire chuter son adversaire : ainsi, il remplace Lamoignon, qui faisait partie de la cour de justice, car ce dernier est jugé trop favorable à Fouquet. Les pièces saisies ne seront communiquées à l'accusé que 3 mars 1663, soit un an jour pour jour après les débuts du procès. Pendant tout ce temps, les partisans et les proches de Fouquet font imprimer et circuler sous le manteau des libelles en sa faveur. Colbert fera supprimer la pension de Jean de La Fontaine, ami de Fouquet qui rédige une Elégie aux Nymphes de Vaux, clairement favorable à Fouquet et poursuivre les auteurs et colpoteurs de gazettes. Cert
ains de ses amis, considérés comme ses complices, ont été eux aussi appréhendés et incarcérés : c'est le cas notamment de Jean Hérault de Gourville, condamné même à mort par contumace pour péculat (détournement de fonds publics par un comptable public) et lèse-majesté, et de Madame de Plessis-Bellière, emprisonnée.
Finalement, plusieurs chefs d'inculpation sont retenus contre Fouquet :
ains de ses amis, considérés comme ses complices, ont été eux aussi appréhendés et incarcérés : c'est le cas notamment de Jean Hérault de Gourville, condamné même à mort par contumace pour péculat (détournement de fonds publics par un comptable public) et lèse-majesté, et de Madame de Plessis-Bellière, emprisonnée.
Finalement, plusieurs chefs d'inculpation sont retenus contre Fouquet :
-réception de pensions sur les fermes mises en adjudication
-acquisition de droits sur le roi par l'utilisation de divers prête-noms
-réassignation de vieux billets surannés...
L'accusation s'emploie à prouver la culpabilité de Fouquet grâce à plusieurs arguments qui se veulent imparables : d'une part, son opulence et ses nombreuses acquisitions (notamment des biens immobiliers), d'autre part, les témoignages de plusieurs manieurs d'argent ainsi que les papiers plus que compromettants trouvés chez lui lors des perquisitions.
Fouquet va se défendre très bien contre ces accusations, profitant d'ailleurs de l'ignorance des affaires financières par le chancelier Séguier, qui a remplacé Lamoignon sur les ordres de Colbert et qui voue une haine tenace à l'ancien Surintendant. Cependant, encore aujourd'hui les historiens sont divisés quant à l'innocence supposée de Fouquet et certains, contre Jean-Christian Petitfils, nourrissent des réserves : peut-être Fouquet n'était-il pas complètement blanc comme neige.
Autre accusation, celle de lèse-majesté, qui se fonde en majeure partie sur le plan de défense trouvé dans la demeure de Saint-Mandé. On reproche à Fouquet d'avoir ourdi un plan de rébellion en corrompant des gouverneurs de citadelles et en fortifiant certaines de ses terres...là-dessus, Fouquet se défendra avec moins d'habilété.
Finalement, un jugement est rendu après trois ans de procès. Pendant ces trois ans, les avocats chargés de défendre Fouquet ont produit plus de dix volumes in-folio de mémoires de défense, ce qui est considérable ! Finalmeet, le 21 décembre 1664, la Chambre de justice reconnaît Nicolas Fouquet coupable de péculat, crime passible de la peine de mort. Mais sur les vingt magistrats chargés de statuer sur son sort, seulement neuf voteront la mort et Fouquet est finalement condamné à la confiscation de tous ses biens et à un exil hors du royaume. Il échappe à la mort d'une voix seulement ! Le marquis de Sourches rapporte dans ses mémoires que la sanction est très bien accueillie, même dans le peuple. Peut-être a-t-elle occasionné une petite déception à Colbert qui, très certainement, avait espéré la condamnation à mort, mais on ne peut en être sûr. D'autres, par contre, vont considérer ce procès comme inique.
La sanction d'exil est commuée par le roi Louis XIV en rétention à perpétuité dans le forteresse de Pignerol, dans les Alpes. En effet, le roi ne pouvait se permettre que Fouquet aille se réfugier dans une Cour ennemie de la France.
Fouquet est donc conduit par les mousquetaires du roi, d'Artagnan en tête, vers la forteresse imprenable.
C'est là qu'il meurt, officiellement, le 3 avril 1680, après près de vingt ans d'emprisonnement. Il meurt en présence de son fils, le comte de Vaux, venu à Pignerol pour visiter son père. La mort de Nicolas Fouquet est en fait due à une crise d'apoplexie, elle-même causée par une longue maladie. Aucun acte de décès n'est établi et la dépouille mortelle de Nicolas Fouquet est tout d'abord placée dans l'église Sainte-Claire de Pignerol, comme c'est la coutume pour tous les prisonniers de Pignerol qui meurent en détention. Son corps sera ensuite transféré vers Paris, dans la chapelle Fouquet du couvent de la Visitation-Sainte-Marie.
Néanmoins, une zone d'ombre entoure les dernières années de Fouquet et Gourville affirme par exemple, dans ses mémoires, que Fouquet a en fait été libéré peu de temps avant sa mort, thèse reprise au siècle suivant par Voltaire. D'autres encore ont affirmé que Fouquet, mort en 1680, aurait été empoisonné (l'Affaire des Poisons se termine à peine). Enfin, il est arrivé également que l'on confonde le destin de Fouquet avec celui du célèbre Masque de Fer, emprisonné lui aussi pendant un temps dans la forteresse de Pignerol après avoir un séjour au château d'If, en face de Marseille...

Lettre de Fouquet à son épouse, datée de 1662, alors qu'il était emprisonné à la Bastille
© Le texte est de moi, je vous demanderais donc de ne pas le copier, merci.
Pour en savoir plus :
-Fouquet, Jean-Christian Petitfils. Biographie.
-Fouquet ou le Soleil offusqué, Paul Morand. Biographie.
-Louis XIV, François Bluche. Biographie.
-Colbert, la politique du bon sens, Michel Vergé-Franceschi. Biographie.
Alison Mossharty, Posté le dimanche 13 avril 2014 11:26
J'ai eu la chance de pouvoir visiter ce château ce que je retiens surtout c'est le jardin. Très bien fait et admirable au niveau de son agencement du vrai Le Nôtre quoi ! Pauvre Fouquet quand même, je trouve son histoire très triste car ça repose surtout sur de la jalousie ...